On remonte dans la chambre. Il n'a suffit que de quelques minutes pour que les premières contractions se fassent sentir. Pour l'instant, rien qui ne soit insupportable. Pour l'instant.
Le temps passe jusqu'au prochain monitoring. On redescend une nouvelle fois en salle d'accouchement. Le graphique montre bien les contractions mais elles manquent encore de régularité et d'intensité. La sage femme nous rassure (ou nous inquiète plutôt) : si le tampon est le plus souvent à efficacité rapide, cela peut prendre jusqu'à deux jours... - soupir - On demande à ce que la sage femme regarde où en est le col, histoire de savoir d'où l'on part. Verdict : à ce moment, le col est long et ouvert à peine à 1. On part donc de rien. Pour information, le travail est terminé quand le col est plat et ouvert à 10. Et en moyenne, il faut compter au moins une heure par unité...
On remonte impatient. Nouveau rendez vous en salle à 16h. Est ce que cela va finir un jour ? On commence à désespérer, le temps se fait long. On y est depuis la nuit de mercredi à jeudi, il est vendredi 11h et le col n'est toujours pas ouvert d'un pouce...
Mais notre souhait va être exaucé. Une demi heure après être remontés, les contractions s'intensifient et deviennent régulières. Et très fréquentes. Alors on essaye de mettre en oeuvre nos cours de préparation à l'accouchement. Surtout la respiration. Julie se débrouille bien. Elle souffre mais semble bien gérer la situation.
Pour le coup, je n'imaginais pas la situation comme cela. Lors des cours de préparation, je m'imaginais en salle d'accouchement avec une sage-femme à nos côtés pour nous soutenir. Mais ce n'est pas le cas. Nous sommes seuls dans notre chambre et Julie commence à souffrir le martyr.
Alors que des contractions normales durent une minute avec une pause de 2-3 minutes environ entre chaque, là il semble que les contractions s'enchaînent sans aucune pause.
Julie n'arrive plus à rester allongée. Elle essaye de prendre une douche. Je l'entends souffrir. En sortant on tente d'essayer différentes positions. Je dis "tenter" car aucune ne permettait d'arranger la situation. Les contractions s'enchaînaient sans répit. Je me souvenais que lors des préparations, la sage femme nous avait dit que si la maman panique ou ne gère plus la douleur, il faut que le papa prenne sa main, la regarde dans les yeux et respire simultanément avec elle. Pour qu'elle se concentre sur la respiration. Pour qu'elle évite de se crisper sur la douleur. Nous le faisons mais j'ai du mal à soutenir son regard. Elle souffre et je ne peux rien pour elle. Ce fut les plus durs moments. Voir sa femme souffrir à ce point fut pour moi une épreuve atroce.
Cela fait trois heures que cette situation dure. Julie ne parle plus. Je la sens presque perdre la boule. Elle répète inlassablement mon nom ou me répète sans cesse dans un sifflement de voix que cela ne va pas... Je me dis que cela fait seulement 3 heures et que potentiellement, cela peut encore en prendre le double. Il faut redescendre, il faut la péridurale, tant pis pour son projet de naissance. Si Julie continue comme cela, elle va finir exténuée et ne sera pas en mesure de faire l'effort final. Dans cette douleur, elle ne profitera pas de ce moment merveilleux.
J'essaye de capter un moment de lucidité. "Il faut prendre la péridurale" lui dis-je. On doit redescendre et la demander. Elle accepte. Encore faut il pouvoir redescendre. Julie a vraiment du mal à marcher. Avec le recul, je me dis que j'aurais du demander de l'aide, un fauteuil roulant par exemple. Mais sur le coup, on se dit que cette douleur est normale (à tort on le verra après) et qu'il faut passer par là.
Je prépare les affaires pour la salle d'accouchement. Cette fois, c'est pour de bon. On ne remontera pas dans cette chambre sans la choupinette !
On redescend péniblement. Et péniblement c'est encore un euphémisme. Je vois encore les regards des gens que l'on croise...
On arrive en salle. On explique la situation à la sage-femme, qui la constate d'elle même. Elle pose des questions à Julie mais n'obtient pas de réponse. Elle avait connaissance de son souhait d'accoucher si possible sans péridurale. Elle nous a donc proposé une solution "intermédiaire", une péridurale que Julie pourrait doser elle-même avec un bouton. Cela évite les désagréments de la péridurale "classique" qui diffuse continuellement une dose élevée d'anesthésiant.
Encore fallait-il trouver une salle d'accouchement. Toutes étaient prises. La situation d'encombrement qui nous avait été signalée ce matin même était bien une réalité. A la dernière minute, une femme qui venait pour un monitoring de contrôle a été priée de patienter pour nous laisser la chambre. Quand elle a vue Julie, elle a effectivement dit qu'elle n'en était pas à ce stade ;-)
L'anesthésiste est arrivée rapidement. Il m'a été demandé de sortir pour la pose de la péridurale. Cela a pris une vingtaine de minute. Au retour, j'ai vu que Julie était soulagée. Elle avait retrouvée une expression de visage normale même si elle était fatiguée. Et pour tout dire, moi aussi j'étais soulagé...
La sage femme a ensuite effectué un contrôle pour vérifier la situation de l'utérus. Verdict : ouvert à huit... C'est à dire presque totalement. Julie est passé d'un col long fermé à une ouverture de huit en 5 heures environ... alors que traditionnellement cela aurait dû prendre 12 heures. Voilà qui explique l'intensité des douleurs.
Vue panoramique de la chambre après la pose de la péridurale.
Suite au prochain épisode...
Bises à tous